Tromperie sur la marchandise

Publié le par Zéro Royal


Pour prendre un avantage décisif dans la campagne présidentielle, l’écurie Royal va développer trois avantages concurrentiels qui vont faire débat.

Ségolène Royal est une femme. Pas de doute en cela, mais ce qui suit est plus fallacieux. Enfin une femme est arrivée sur la scène politique ! Voici venu le temps des femmes ! Les femmes font de la politique différemment,… et vous allez voir ce que vous allez voir. Nous prend-t-on vraiment pour des cons ? Ce qui distingue un homme d’une femme politique tient entre le pantalon Cardin et le tailleur Channel. L’essentiel est davantage ce qui les réunit que ce qui les sépare. Ils ont en eux la même envie de pouvoir (rebaptisée désir d’avenir), la même férocité au combat ; ils fréquentent le même microcosme politicien qui les emprisonne dans une bulle. Ce sont des killers qui flinguent tout ce et tous ceux qui leur barrent les chemins de l’ascension dans leur carrière politique. Je dirais même que les femmes sont plus dangereuses à ce petit jeu.

Ségolène Royal est jeune. C’est un changement générationnel ! Il est vrai qu’avec ses 53 ans, elle laisse loin derrière elle les 74 ans de Chirac, les 70 ans de Jospin, les 78 ans de Le Pen et les… 57 ans de Dominique Strauss-Kahn. Certes, on ne peut nier que la longévité exceptionnelle de nos élus qui s’accrochent à leurs postes pose problème pour le renouvellement de la classe politique. De là à stariser l’innocente fraîcheur d’une nouvelle génération politicienne, il y a un pas que certains franchissent allègrement.

Toujours est-il que le jeunisme fait son entrée en politique, avec ses promesses de renouveau et d’idées audacieuses jamais avancées auparavant. Nous prend-t-on ici encore pour des cons ? Quel est l’homme qui a le plus marqué de son empreinte le vingtième siècle : Laurent Fabius, le plus jeune premier ministre de France, Valéry Giscard d’Estaing, le plus jeune président de France ou Charles de Gaulle revenu au pouvoir de 68 ans à 78 ans ? Y a pas photo. Georges Brassens a chanté que quand on est con, on est con ! le temps ne fait rien à l’affaire, qu’on ait vingt ans, qu’on soit grand-père. Il avait raison.

Ségolène Royal est neuve en politique. Ça c’est le bouquet. Enarque, adhérente au PS depuis 28 ans, chargée de mission à l’Elysée de 1982 à 1988, députée des Deux-sèvres depuis 18 ans, ex-ministre de l’environnement, ex-ministre déléguée à l’enseignement scolaire, deux fois ex-ministre déléguée à la famille, présidente de la région Poitou-Charentes depuis 2004. À ce compte-là, une écrasante majorité des députés de l’assemblée nationale sont des puceaux en politique.

Pourtant, il y a quelque chose de nouveau dans la candidature de Madame Royal
. Il faut le chercher ailleurs. Pour la première fois, une candidate d’un grand parti a été élue par les sondeurs, et qu’on ne dise pas que les sondages reflètent l’opinion publique alors que c’est au contraire l’alliance entre les médias et les sondages qui fabrique cette opinion. La peopolisation entre par la grande porte dans la campagne. Verra-t-on, comme le craint Henri Emmanuelli, les partis organiser des barnum avec pom pom girls et lâchers de ballons à la sortie des meetings ? à l’américaine, avec des militants transformés en supporters acharnés de leur idole ? Voilà un danger bien plus menaçant que la crise actuelle de la démocratie représentative.

Tout cela, Ségolène le sait et elle manipule avec talent les opinions en faisant de la communication sa stratégie de conquête du pouvoir. Elle sait aussi qu’elle joue avec le feu, car tenir la Une médiatique pendant encore cinq mois relèvera du miracle tant les médias sont des incorrigibles zappeurs, entraînant dans leur sillage une opinion versatile qui ne demande qu’à être retournée. Dans le temps médiatique, seul l’instant fugitif compte, et une politique inventée en temps réel et en prime time est une construction bâtie sur du sable, sans avenir.

Ce qu’il faut surveiller de près, au delà du vacarme médiatique et des gesticulations de politiciens en quête de postes ministériels, c’est l’effet de ce tsunami politique. Va-t-il atteindre le système, le détruire, le refonder disent certains ? Rien n’est moins sûr car on n’a jamais vu un changement de système produit de l’intérieur, par un de ses éléments issu du sérail et nourri en son sein. Changer le système peut-être, à la marge, changer de système c’est une autre histoire. Je parie qu’encore une fois le système politicien français vaincra. Les médias feront tout pour l’y aider.

Publié dans zero.royal

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